C’est un rêve

c’est un rêve

 

l’été  a brûlé les fenêtres

le basalte patiente

à côté de moi

 

ailleurs d’autres parlent

tranquilles

– comme si ce n’était pas la dernière fois!

 

dans la cuisine

des rayons fous apportent

le goût de la montagne chaude

 

je ne dis rien

je fais une salade immense

de lumière

 

c’est un rêve qui persiste

sous ma peau de pluie

c’est un rêve qui refuse

que je m’en aille

 

A quand un poème?

Pour Eliana

 

A quand un poème?

 

Question amie

 

Dans l’herbe de la nuit

j’entends des nœuds humides

qui se défont

 

Cessons de parler d’autre chose

 

Au secret du jardin

monte patiemment le silence

de la sève

 

Des poèmes se trament

où nous savons nous taire

 

dans la lumière des arbres

nous avons marché dans la lumière des arbres

le jour entre les branches

s’échevelait

sa fougue avait la fraîcheur de l’enfance

qui glissait sous nos pas

 

les troncs nus

hilares et souples

enroulaient le tissu fragile du ciel

puis le rendaient –toujours

 

nous avons brûlé dans ce jeu blanc

qui n’était pas le nôtre

 

l’écorce, la douce écorce, nous aura-t-elle aimés ?

 

La nuit

Lorsque la nuit demeure

aux lèvres

aux commissures des yeux

suspendue et entière

 

elle échappe

au monde qui veut la vendre

la définir une fois pour toutes

quelques sous pour la nuit merveilleuse

achetez

elle n’est pas fragile

elle est en plastique

et le cadre est offert!

 

elle étreint seulement

immobile et muette

celui qui se contente

d’aimer

sur le fil du souffle

son mystère d’eau fraîche

 

ainsi la nuit échappe

à son effritement

 

 

Mars

Mars a vêtu les arbres

d’une robe de ciel clair

et de dentelle sombre

 

ils vont longeant ma route

patients, rompus au jour

et gorgés de nuit fraîche

 

dans leur intermittence

l’horizon a glissé

ses courbes encore blanches

et

imperceptible presque

un souffle

 

Je voudrais

Je voudrais boire encore

une tasse de nuit

et dans sa froide haleine

me baigner

un peu plus longtemps

 

le halo jaune de ma lampe

m’attend en frémissant

à l’orée du bureau

mais

 

qui étreindra sinon la nuit

la chair étrange

de mes rêves?