Une joie

c’est un prolongement d’encre et de papier

c’est la pulpe de ces années de blog tenu, de blogs lus, d’échanges, de rencontres dont les écheveaux ne sont pas vides

c’est une façon de ne pas oublier que l’écriture est une forêt dont j’aime tous les arbres

c’est une douce joie et presque un souvenir où vous aparaissez

merci d’avoir marché tout à côté de moi.

Le silence des arbres, paru chez Citadel Road Editions, est maintenant disponible. Si vous en souhaitiez un exemplaire, vous trouverez ci-joint le bon de commande à transmettre à Emmanuelle Le Cam, qui a eu la bonté de me proposer l’édition de ce petit recueil poétique.

la dernière fois que j’ai écrit un poème

Je me souviens de la dernière fois que j’ai écrit un poème. Souvenir précis et lointain à la fois.

La fenêtre m’offrait un grand arbre clairsemé par la pluie d’automne, et qui répondait au sommeil des enfants. La pièce était comme ça, très haute, accrochée à un mur de vertige. Il fallait se pencher pour deviner, à son pied, une rivière.

J’étais seule. Et bien que l’arbre m’invitât délicatement au bonheur, j’ignorais à demi le goût de cet après-midi sans fièvre. Tout s’était miraculeusement écarté autour de mon désir d’écrire. Le quotidien perdait l’âpreté de ses contours, comme s’il n’existait plus qu’à travers une vitre de verre dépoli. J’écrivais un rêve qui lentement faisait des cercles autour de mon cœur. C’était un rêve qui disait adieu. Je prenais le temps de dire la lumière de ce rêve, de convoquer encore une fois la maison perdue.

J’écrivais. Je savais bien que c’était rare, d’écrire ainsi dans le silence et l’orbe d’un feuillage frêle, dans la douceur de ce qui va bientôt finir. C’était un instant d’immobilité illusoire, de discret basculement. Pourtant, je ne savais pas, je ne savais pas suffisamment,  que c’était si beau, si précieux, d’être ainsi suspendue à la croisée des choses.

Je guettais, en écrivant – j’attendais presque –  le réveil des enfants.

 

arbre haute loire

A quand un poème?

Pour Eliana

 

A quand un poème?

 

Question amie

 

Dans l’herbe de la nuit

j’entends des nœuds humides

qui se défont

 

Cessons de parler d’autre chose

 

Au secret du jardin

monte patiemment le silence

de la sève

 

Des poèmes se trament

où nous savons nous taire

 

dans la lumière des arbres

nous avons marché dans la lumière des arbres

le jour entre les branches

s’échevelait

sa fougue avait la fraîcheur de l’enfance

qui glissait sous nos pas

 

les troncs nus

hilares et souples

enroulaient le tissu fragile du ciel

puis le rendaient –toujours

 

nous avons brûlé dans ce jeu blanc

qui n’était pas le nôtre

 

l’écorce, la douce écorce, nous aura-t-elle aimés ?

 

La nuit

Lorsque la nuit demeure

aux lèvres

aux commissures des yeux

suspendue et entière

 

elle échappe

au monde qui veut la vendre

la définir une fois pour toutes

quelques sous pour la nuit merveilleuse

achetez

elle n’est pas fragile

elle est en plastique

et le cadre est offert!

 

elle étreint seulement

immobile et muette

celui qui se contente

d’aimer

sur le fil du souffle

son mystère d’eau fraîche

 

ainsi la nuit échappe

à son effritement